Garde Nationale, Service civique, Réservistes….

Garde Nationale, Service civique, Réservistes….

Lettre ouverte d’un appelé du contingent devenu officier général.

Cette lettre est adressée aux femmes et hommes politiques de tout bord. Elle n’exprime ni regret, ni amertume ; elle est, avant tout, le témoignage d’un homme qui a servi son pays pendant quarante années au sein de l’institution militaire, du grade de militaire du rang à celui de général de brigade aérienne.

Appelé du contingent au début des années 1970, à une période où Santana enflammait Woodstock, où les pantalons à pattes d’éléphant et les chemises à fleur constituaient la norme, j’ai pu mesurer pendant une année la « douceur de vivre » en dortoir de douze, sous la coupe d’un sous-officier de semaine qui nous “éveillait” aux charmes de la vie en collectivité.

De mes camarades de chambrée, je garde le souvenir de types formidables venant des quatre coins de France avec chacun leur culture, leur accent, leur histoire ou encore leur façon de voir les choses.

Nous échangions beaucoup, apprenant à nous connaître et nous comprendre.

Le jour de la libération, je rendais mon paquetage pour rejoindre une école de sous-officiers d’active. Puis quelques années plus tard, j’accédais à l’épaulette et devenais officier fusilier commando de l’air.

Métier au contact des hommes, j’ai eu l’honneur de commander des unités d’appelés du contingent  dont une, en particulier, située en région parisienne entre 1986 et 1990, l’Escadron des fusiliers commandos de l’air.

Dans cette unité d’une moyenne d’âge de 24 ans, se croisaient pendant dix mois des jeunes venant  de villes de banlieues situées dans les Yvelines, le Val d’Oise et la petite couronne.

Carrefour de cultures, espace de découverte, lieu d’échanges, cadre d’apprentissage de la vie en collectivité, de la notion d’effort, l’escadron que je commandais offrait aux jeunes une opportunité unique, source de compréhension mutuelle et d’intégration.

Tout n’était pas parfait, mais les quelques mois passés à vivre ensemble au service d’une mission exigeant engagement physique, discipline et sens du collectif, permettaient à certains, pour la première fois dans leur vie, de comprendre sur quels principes et valeurs une société comme la nôtre était fondée.

Les cadres jouaient un rôle déterminant dans cette belle aventure mais beaucoup reposait sur la capacité des appelés eux-mêmes à s’entraider et à s’épauler. J’ai toujours eu une grande admiration pour ceux qui ont consacré du temps pour permettre à leurs camarades de grandir, de découvrir un  nouvel environnement et leur donner l’envie de croire en d’autres valeurs que celles véhiculées dans un contexte où l’autorité parentale avait failli et n’avait pas joué son rôle d’éducateur.

Le service militaire obligatoire permettait à certains de quitter l’adolescence pour entrer dans la vie d’adulte. Pour d’autres il contribuait au processus de maturation et les préparait à entrer dans la vie professionnelle avec des valeurs et des clés de lecture de notre société.

Certains pourraient croire ici que je vais regretter la suspension du service militaire obligatoire. La réponse est non car les contraintes opérationnelles l’imposaient. Les retours d’expérience des opérations extérieures montraient qu’une armée professionnelle devenait la meilleure réponse pour faire face aux défis à relever. Dont acte.

Toutefois je pense que l’on n’a pas poussé l’analyse assez loin. Cette décision a eu un impact majeur sur les armées mais surtout sur l‘évolution de la société française.

J’ai été frappé, comme beaucoup, par les tragiques évènements qui ont touché la France. Puis, je me suis posé la question, comme beaucoup : Qu’avions-nous raté pour en arriver là ?

Les attentats contre le journal Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher ont été commis par les frères Kouachy nés en 1980 et 1982 et A. Coulibaly né en 1982. Les attaques perpétrées le 13 novembre sont l’oeuvre de jeunes français n’ayant pas la trentaine. Ils appartiennent aux premières générations qui n’ont pas été concernées par le service militaire obligatoire. Cela aurait-il changé le cours des évènements ? Difficile à dire, mais je ne peux m’empêcher de faire le lien.

A l’heure où des voix s’élèvent pour évoquer la création d’une Garde Nationale, où d’autres souhaitent la mise en place d’un service civique obligatoire, je ne peux que souscrire à ce type d’initiative qui décrit une prise de conscience mais aussi quelque part un constat d’échec.

Mais je souhaiterais ici partager une inquiétude.

Il ne faut pas sous-estimer l’ampleur de la tâche et sacrifier sur l’autel d’une quelconque idéologie un véritable projet au profit de « mesurettes » destinées à satisfaire un électorat. L’enjeu est considérable.

Aujourd’hui au contact de mes étudiants, je mesure chaque jour la richesse de notre société, de sa jeunesse, pleine d’enthousiasme qui se nourrit de sa diversité et montre une profonde envie de s’ouvrir au monde. Nos politiques ont donc une responsabilité majeure. Je pense que les Français sont prêts à soutenir un effort qui permettrait à une partie de la jeunesse française de se réconcilier avec les principes et les valeurs qui forgent notre société.

Il faut une réelle volonté politique et le courage pour mettre en place les moyens humains et financiers nécessaires. Quel que soit le cadre retenu, certains principes devraient être respectés : l’universalité, le caractère obligatoire, une durée suffisante, un encadrement de qualité. Il y a dans notre société des femmes et des hommes de bonne volonté qui sont prêts à s’engager et contribuer ainsi à la réussite d’une telle entreprise. Nos politiques doivent leur donner l’envie ainsi que les moyens. Le jeu en vaut la chandelle, la société française en ressortira grandie, forte dans son unité et si riche dans sa diversité.

P.DESJARDINS

Ukraine, élections, femmes et leadership

Ukraine, élections, femmes et leadership

Les 29 millions d’électeurs Ukrainiens viennent d’élire leurs représentants locaux, maires, conseillers municipaux et régionaux. Observateur de ces élections sous l’égide de l ‘OSCE j ai été déployé dans l’ouest de la région d’Odessa près de la frontière moldave. Ce fut, encore une fois, une expérience inoubliable, différente de mes missions précédentes, en Albanie et en Azerbaïdjan, avant tout humaine au contact de personnes accueillantes et chaleureuses en dépit d’un climat politique sensible et d’une situation économique difficile.

Une mission telle que celle-ci conduit l’observateur à plonger au plus profond du pays et ainsi prendre le pouls d’une population vivant loin des grandes villes et des centres décisionnels.

Je voudrais ici être le témoin de ce qui m’a particulièrement frappé durant cette mission et souligner le rôle crucial joué par les femmes qui, dans 90% des cas, assuraient la présidence des bureaux de vote et des centres de décompte des voix.

Ayant été moi même président d’un bureau de vote, membre du bureau ou encore scrutateur, j’ai conscience du défi que ces personnes ont du relever, notamment lorsque la loi electorale, récemment votée, imposait une nouvelle organisation et des procédures différentes (plusieurs scrutins concomitants, ré définition des circonscriptions, modification des listes électorales, nombre élevé de candidats, rédaction d’un grand nombre de procès verbaux, procédures de dépouillement et de décompte extrêmement longues, plus de vingt et quatre heures…)

Ces femmes ont relevé le défi avec panache montrant tout au long de ces longues heures un sens de l’engagement exemplaire.

Parfaitement organisées, maîtrisant leur sujet, elles ont su, par dessus tout, créer des atmosphères de travail adaptées au sein des commissions et des conditions d’accueil des électeurs chaleureuses et bienveillantes.

En dépit d’une fatigue visible, elles n’ont jamais failli. Je leur trouve un grand mérite car le contexte général dans lequel se trouve aujourd’hui l Ukraine n’est pas des plus favorables, politiquement et économiquement parlant.

La faible participation des électeurs (35% dans les villes, 50% dans les campagnes) pourrait ainsi indiquer un manque d’intérêt dans la vie politique et donner l’impression qu’ils ne croient pas en leur capacité à faire bouger les lignes en insérant un bulletin de vote dans une urne.

Certes, ils sont généralement très critiques du système en place et aspirent à autre chose. La musique semble connue…..

Mais je retiens des discussions et des échanges que j’ai pu avoir avec toutes ces personnes que l’envie est la et que la résignation n est pas à l’ordre du jour. Message fort sur leur volonté de travailler et de croire encore dans le potentiel de leur pays et de ses ressources, à tous points de vue.

Cet air frais est soufflé notamment par les femmes qui ont un rôle déterminant à jouer. Les clivages existent encore entre les générations qui ont connu un modèle aujourd’hui appartenant à l’histoire mais toujours “séduisant” pour certaines et celles dont le téléphone mobile n’arrête pas de biper aux messages reçus sur les réseaux sociaux……

Il faudra du temps. Combien ? Difficile à dire. Nous avons une très grande responsabilité vis à vis des classes dirigeantes de ce pays me semble-t-il.

La démocratie ne s’exporte pas sur le principe d’un “copier/coller”.

Donner du temps au temps certes, mais aussi permettre à celles et ceux qui dirigent d’exprimer ce qu’ils attendent d’une aide extérieure sans rien leur imposer mais tout en faisant comprendre que les aspirations de la population doivent être prioritairement entendues, notamment en termes de justice et d équité.

Le train est en gare, la voie est tracée. Charge à celles et ceux qui vont diriger de prendre la mesure du défi et de ne laisser personne en route…..

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Patrick DESJARDINS

“Peut-on exporter la démocratie ?”

“Peut-on exporter la démocratie ?”

Six minutes (chrono !!!) pour répondre à la question : « Peut-on exporter la démocratie ? »

« Pour tenter de répondre à la question je souhaitais partager avec vous quelques leçons tirées d’expériences de terrain avec les Nations Unies et avec l’Otan à l’aune des opérations en Afghanistan et en Libye, puis sous l’égide de l’OSCE au cours de missions d’observation électorale dans des pays de l’ex-URSS.

Deux premiers commentaires au préalable.

Il y a tout d’abord une approche que j’appellerais idéale voire “idéaliste”, qui correspond aux valeurs universelles parfois qualifiées de « valeurs occidentales ». C’est l’idée de promouvoir les libertés individuelles et les droits de l’homme ; de souhaiter que tout être humain puisse vivre selon ses choix dans un environnement stable sans conflit, et enfin de librement choisir celles ou ceux qui placés à la tête d’un Etat reconnu par la communauté internationale lui garantiront la sécurité et les conditions d’un épanouissement durable.

Mais l’enfer n’est-il pas pavé de bonnes intentions ?

Car il y a la « realpolitik » où les priorités sont dictées par des impératifs directement liés à la protection ou la promotion des intérêts nationaux, politiques, économiques ou financiers. Alors on exporte la démocratie quand c’est possible ou quand cela nous arrange, ou encore quand c’est possible et que cela nous arrange. Où encore quand on y est poussé à le faire, sous la pression d’une opinion publique informée et sensibilisée, voire manipulée, qui ne comprendrait pas que l’on reste sans agir alors que d’autres souffrent.

Ce qui possible avec un Etat failli devient plus compliqué lorsqu’il s’agit d’un puissance régionale, nucléaire de surcroît. Et puis il est bien difficile de promouvoir la démocratie avec des régimes autocratiques qui sont aussi des marchés potentiels ou des clients choyés. (suite…)

UE / OTAN / RUSSIE … la tectonique des plaques

UE / OTAN / RUSSIE … la tectonique des plaques

En 2007, lors d’un échange de vues avec un chercheur russe, ce dernier m’assurait avec une grande conviction que « l’élargissement de l’Union européenne était dicté par Washington », me rappelant les vagues d’adhésion successives en 1999 et 2004 d’anciennes républiques socialistes soviétiques à l’OTAN et à l’Union Européenne, situation difficilement acceptable pour Moscou.

Cette affirmation, provocatrice à souhait, permit de lancer une discussion où (suite…)

Garde Nationale, Service civique, Réservistes….

“Leadership et Enchantement”

On m’a récemment invité à répondre à la question : « Comment créer de l’enchantement pour permettre à celles et ceux qui sont placées à la tête d’équipes ou de projets de rêver et de faire rêver ? ».

Voici un résumé de quelques réflexions décrivant mes idées sur la façon dont un manager, confronté à la nécessité de s’adapter à un monde mouvant et complexe, pouvait trouver les ressources nécessaires pour mobiliser et avancer.

C’est bien de leadership dont il s’agit et je voudrais partager ce en quoi je crois pour tenter de relever ce défi. (suite…)

7° Festival de géopolitique de Grenoble

7° Festival de géopolitique de Grenoble

Pour la 5° fois consécutive, j’ai eu le plaisir avec Louis Bernard et son équipe de la société Layer Cake, d’organiser une simulation de gestion de crise internationale sous l’égide des Nations unies.

Cet exercice a permis à 128 étudiants en classes préparatoires de tester leurs talents de négociateurs et de prendre conscience de la complexité des relations internationales.

Répartis en quatre Conseils de sécurité des Nations Unies, les étudiants ont joué, pendant toute une journée, le rôle d’ambassadeurs chargés de représenter les positions de leurs pays respectifs dans la gestion d’une crise majeure au Moyen Orient.

L’objectif de ce type de simulation est d’aborder la géopolitique par le biais d’une mise en situation où chacun doit sortir de son cade habituel et, in situ, trouver les ressources nécessaires pour rallier à ses positions les autres membres du Conseil. Cet exercice fait appel à des qualités d’écoute, d’intégrité et des capacités d’analyse et de communication.

Cette année encore, j’ai été frappé par la rapidité avec laquelle ces jeunes étudiants se sont appropriés leurs rôles et se sont engagés sans retenue dans des débats parfois « enflammés » mais toujours courtois entre « diplomates en herbe ». A la fin d’une journée bien remplie, j’ai croisé des visages fatigués mais surtout des jeunes ravis d’avoir passé une journée aussi intense. Je reste convaincu que cette façon d’aborder les organisations internationales et d’analyser une crise régionale sous une forme ludique demeure une démarche d’une grande efficacité.

 L’EM Grenoble offre un cadre exceptionnel pour ce type d’événement qui trouve naturellement sa place  dans un festival consacré à la géopolitique et qui, chaque année, connaît un succès grandissant.

 Merci à l’EM Grenoble et un grand bravo à toutes celles et ceux qui ont activement participé.

 Rendez-vous l’année prochaine !!!

PatrickD.